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Une présentation donnée le 1er Juin 2023 dans la cadre du Sommet sur la Santé sexuelle, organisé par Sexoblogue.
Dans cette présentation, Magaly explore les raisons pour lesquelles une éducation à la sexualité inclusive est cruciale, en mettant l’accent sur les méthodes et les approches qui favorisent une pratique inclusive et respectueuse.
TRANSCRIPTION
[Musique]
Salut Magaly!
Bonjour Arnaud!
Ça me fait super plaisir que tu aies pu participer à la deuxième édition du sommet de la santé sexuelle. Donc Magaly Pirotte pour les gens qui ne la connaissent pas elle est Canadienne et elle est à Montréal elle est chercheuse en santé sexuelle et la fondatrice du projet SEX-ED + qui veut dire éducation sexuelle positive et donc tu vas certainement en parler mais tu crées plein d’outils et les distribues au niveau international et tu vas aborder un point qui est l’inclusivité par rapport à l’éducation la sexualité donc je te laisse faire ta présentation.
Bonjour tout le monde! Aujourd’hui je vais vous parler d’éducation à la sexualité bien entendu mais avec l’inclusivité au cœur de nos pratiques. Comme l’a mentionné Arnaud je viens du milieu de la recherche et des sciences sociales et politiques, J’ai beaucoup travaillé sur les mouvements sociaux et les stratégies politiques et associé ça au mouvement pour la santé des femmes, le Planning, la défense des droits. J’ai aussi travaillé comme intervenante dans ce genre de projets.
Au cours des dernières années j’ai fondé le projet SEX-ED +. C’est un projet qui a diverses parties
- documenter la diversité génitale et créer des outils pour les professionnel.le.s
- rendre ces connaissances disponibles à toutes et tous via une base de données en 3D qui n’est pas encore en ligne mais qui va bientôt l’être
- produire des analyses et de la vulgarisation scientifique sur l’éducation à la sexualité parce que souvent quand on est travailleur/travailleuse de terrain on n’a pas grand temps pour lire ce qui sort ça peut être le fun d’avoir accès à des extraits de ce qui sort dans la recherche, qui peuvent informer nos pratiques
Ce qu’il y a au cœur de mon travail en fait c’est trois points
- Centrer la parole et les expertises des populations concernées
- S’assurer que chaque personne a accès à des services, des informations et des soins compétents, adaptés et qui respectent sa dignité, peu importe son corps, son identité, son expérience
- Et toujours amener le fait que la sexualité est politique, qu’elle n’existe pas en vase clos et que ça se passe à l’intérieur de dynamiques sociales qui ont un impact sur nos vies et nos parcours.
Pourquoi est-ce qu’on travaille en éducation sexuelle, vous comme moi?
Souvent en fait c’est une passion, c’est une vocation on a vraiment le désir d’accompagner les gens dans leur parcours de vie. C’est un privilège incroyable. C’est un métier qu’on fait avec notre cœur Parfois, souvent, bénévolement et il n’y a vraiment personne qui fait ça avec une volonté de discriminer ou de nuire. Et en fait c’est toutes ces raisons-là qui font que parfois c’est difficile de se remettre en question, de remettre en question ses pratiques, parce qu’on met tellement de cœur dans ce qu’on fait.
Mais là c’est l’exercice que je vous propose de faire: on va prendre une grande respiration ensemble puis on va regarder nos pratiques, nos interventions, et en quoi, des fois, involontairement, elles peuvent avoir des impacts qui sont négatifs ou sous-optimaux par rapport aux personnes auprès de qui on intervient Je vais prendre des exemples que soit j’ai dit moi-même, soit qui ont été dit dans un contexte où j’étais soit qui viennent de recherches que j’ai menées dans lesquelles les jeunes parlaient de leur expérience avec l’éducation à la sexualité
Et surtout avant qu’on commence je vais vous inviter à vous rappeler les sages paroles de Jean Milburn, qui est la maman de Otis dans Sex éducation et qui parle en fait de c’est quoi être un bon sexo-thérapeute.
(Video)
C’est pourqu’on se rappelle que la plupart du temps « It’s not about you ». C’est pas à propos de nous, c’est vraiment à propos des populations qu’on veut desservir et l’impact qu’on va voir sur elles.
Si on parle de pratiques inclusives c’est que de facto il y a des pratiques exclusives.
C’est quoi qu’on veut dire quand on parle d’exclusion?
Souvent on pense que l’exclusion c’est de dire du mal d’un groupe social de refuser de le traiter, de le soigner , l’insulter. On voit ça comme des actes qui sont individuels, grossiers et facilement identifiables et condamnables.
Si c’était ça, ce serait vraiment facile d’avoir des pratiques inclusives car ça serait facile de les détecter puis de les modifier. En réalité c’est quoi l’exclusion? C’est tout un tas de mécanismes qui sont subtils, involontaires et qui sont souvent indétectables par la personne qui en est responsable. Ça prend tout un tas de formes que vous allez voir sur la prochaine diapo, c’est ancré dans nos représentations sociales
puis nos représentations sociales c’est quoi?
C’est tout ce qui nous constitue en tant qu’être humain, tout ce qu’on pense, nos affects, ce qui est ancré dans notre historique D’où on vient? Qui on est? Où on est né? Quelle est l’éducation qu’on a reçue? Et tout ceci constitue nos représentations sociales de c’est quoi une bonne vie. Ce qui est « bien » qu’on pense « bien ». Mais les représentations sociales d’un individu sont quelque chose qui lui appartiennent et les autres individus qui vont être en présence avec nous ont aussi leur propre « set » de représentations sociales. Et l’exercice que je veux qu’on fasse c’est de prendre conscience de nos représentations sociales lorsqu’on intervient des biais involontaires qu’on a et qui en découlent et qu’on entame une déconstruction active de ces représentations sociale là pour savoir c’est quoi, d’où ça vient pour le placer dans une petite boîte « ok ceci c’est qui je suis et ce que je pense » et être capable de jouer là-dedans pour se décentrer et être capable d’avoir une empathie, une compréhension des expériences des autres et de la diversité de leurs vécus.
Les mécanismes de l’exclusion on va passer là-dessus très très vite mais on les a on les a catégorisés dans une recherche qu’on a fait avec des collègues qui s’appelle « Promouvoir des programmes d’éducation à la sexualité positive inclusive et émancipatrice« . C’est en ligne vous pouvez me contacter ou contacter Arnaud je lui passerai le lien Si vous voulez en savoir plus, c’est de là que ça vient et donc j’ai créé 5 catégories puis pour chacune de ces catégories là j’ai mis des exemples parce qu’en fait on va pas parler de grands concepts on va parler du concret, de ce qui se passe sur le terrain pour voir c’est quoi qu’on fait et comment est-ce qu’on peut améliorer ce qu’on fait.
Premier exemple c’est la marginalisation
C’est refuser à un individu ou à un groupe la pleine participation le mettre à l’écart et en fait par extension on lui refuse la possibilité de contribuer pleinement et de manière significative à la société et à ses débats Je vais vous donner trois exemples de marginalisation Au Canada il y a eu à un moment un petit mouvement de panique probablement créé par les mouvements anti-avortement autour de l’avortement sélectif des fœtus de sexe féminin par les personnes qui venaient d’Asie et donc qu’ on supposait une préférence pour les enfants mâles qui menaient à des avortements sélectifs des fœtus filles. C’est quelque chose qui n’a pas été documenté au Canada.
Mais j’ai entendu par exemple dans le cadre de tables de concertation des personnes, des intervenant.e.s dire que lorsque la personne était originaire d’Asie, elle ne disait pas le sexe du fœtus, même si elle l’avait vu. En fait il y avait un refus de soins puis un refus de passer l’information à une personne sur la base de son appartenance à une communauté X Y.
Un autre exemple: il y a beaucoup de fois en fait on voit que les activités d’éducation à la sexualité sont organisées après l’école. On fait ça en fait parce qu’on se dit que les jeunes ils sont disponibles après l’école donc on va organiser l’activité à ce moment-là. Ça part quand même d’un présupposé que les jeunes sont libres après l’école. Mais c’est pas une réalité pour tout le monde Il y a des jeunes qui sont en charge de famille, qui doivent passer chercher leur petit frère, leur petite sœur à l’école, qui doivent leur faire à manger ou alors qu’ils doivent aller aider leurs parents au magasin ou des choses comme ça. Des fois il faut penser que ce qui va pour un jeune en fait va pas du tout pour un autre parce qu’ils et elles n’ont pas les mêmes réalités de vie, parce qu’ils n’appartiennent pas à la même classe sociale, ils ont pas les mêmes conditions.
Un autre exemple c’est la question d’avoir du matériel qui est adapté aux élèves de la différence capacitaire. C’est à dire que la plupart du temps le matériel pédagogique qu’on a et on s’entend qu’on n’en a pas beaucoup en éducation à la sexualité il est fait pour des gens qui ont toutes leurs capacités intellectuelles, cognitives et physiques Donc souvent le matériel est pas adapté pour les personnes qui ont des déficiences visuelles pour les personnes qui ont des déficiences motrices qui ont des retards cognitifs ou des difficultés et donc en fait de facto on les exclut.
On voit trois exemples en fait de marginalisation ou les pédagogues n’étaient pas du tout dans un désir d’exclure des personnes ou des communautés mais par échec à se décentrer et à penser la diversité des expériences de leur public, ils et elles ont failli à les inclure tous.
Deuxième catégorie c’est la stigmatisation,
un mécanisme qui consiste à blâmer, critiquer, dénigrer, humilier, réduire au silence, pathologiser ou faire peur et ça a ceci de de spécifiques que c’est intériorisé par les personnes de ces communautés donc qui intériorisent tous les stéréotypes négatifs on va prendre un exemple avec les personnes un témoignage d’un jeune qui est issu de la communauté LGBT et donc il dit:
« L’unique fois ou on a parlé d’individus LGBTQI+ en éducation sexuelle c’était pour dire que les hommes qui ont du sexe avec d’autres hommes sont plus à risque de contracter une ITSS et le VIH/SIDA. L’homosexualité est associée à la propagation des infections. »
C’est quoi l’impact que ça a eu sur ce jeune-là? Il dit plus loin dans l’entrevue
« l’éducation à la sexualité, ça renforce le sentiment que jamais personne ne va t’aimer, que tu n’auras jamais de partenaire. »
On peut s’entendre que son expérience en éducation à la sexualité a pas aidé à une prise de conscience de son homosexualité dans un contexte associé à des choses positives et diverses. En fait ce qui a été positif pour cette personne là c’est l’émission télévisée « Grey’s Anatomy » qui met en scène une médecin qui est lesbienne c’est un personnage bien normal et qui est dépeint de façon positive.
Donc en fait dans le contexte de l’éducation à la sexualité cette personne-là n’a pas eu accès à une représentation de l’homosexualité qui soit positive, diverse, qui montre la richesse d’une communauté de pratiques, de types de familles, on a juste associé ça à: « t’es plus à risque d’attraper le sida ». Donc impact très négatif et stigmatisation.
Un autre exemple (ça c’est un exemple vécu) une personne dit dans le cadre d’une intervention:
« L’excision est une mutilation qui est interdite dans ce pays. Si vous êtes à risque ou si vous connaissez quelqu’un qui est à risque il faut en parler, il y a des lois qui vous protègent et les personnes responsables seront poursuivies. »
Ça part d’une excellente intention mais c’est quoi l’impact de ça? En fait souvent les jeunes filles qui sont à risque d’excision se trouvent dans un contexte migratoire et de racisation et donc c’est un contexte où il y a une crainte de la police, des procédures judiciaires, et des services sociaux. Et quand on fait ce genre d’intervention , la personne à risque c’est sûr qu’elle ne va pas en parler, puis c’est sûr qu’elle ne va pas venir dire qu’elle est à risque d’excision. Parce qu’au-delà de la peur de l’excision et de ses répercussions il y a aussi la crainte des répercussions sur sa famille et sur sa vie qui peuvent se traduire par une déportation, la judiciarisation, voire de se retrouver dans les services sociaux. Ce que nous on appelle la DPJ (la protection de la jeunesse) je ne sais pas comment ça s’appelle chez vous mais en tout cas se retrouver placé.e en dehors de sa famille au nom de sa protection.
C’est quoi qui aurait eu un impact plus positif?
C’est de dire: « l’excision c’est une pratique qui est courante dans certains pays, que c’est pas permis ici mais que si c’est une question qui vous préoccupe et que vous souhaitez en parler il y a des organismes et des ressources spécialisées, qui peuvent accompagner la jeune avec ou sans sa famille avec des intervenant.e.s qui parlent plusieurs langues et donner les ressources. »
C’est comme sortir l’idée de la judiciarisation et de la poursuite parce que ça c’est quelque chose qui va faire que la jeune ne va jamais probablement parler de sa situation à risque et donc là encore une fois au niveau du pédagogue ou de la pédagogue on n’a vu qu’une facette de l’expérience c’est-à-dire cette personne est à risque d’excision, on n’a pas vu l’autre facette de l’expérience, parmi une multiplicité de facettes, qui est de vivre dans un contexte migratoire ou de racisation qui place à risque de violences policières, d’incarcération, de judiciarisation, de déportation.
Un autre exemple. Je vais en couper certains pour entrer dans le temps mais celui-ci je le trouve vraiment intéressant parce qu’on l’a souvent dit, je l’ai déjà dit aussi :
« Pour les personnes issues des communautés culturelles minoritaires le coming out est souvent difficile au sein des familles ».
Donc on part d’une posture plus ou moins informée sur le fait que certaines communautés ont des difficultés à accepter l’homosexualité. C’est quoi l’impact? On était bien intentionné.e mais en fait on généralise, on suppose que toute une communauté est homophobe. Ça peut être une généralisation blessante pour le ou la jeune parce que ce jeune là n’est pas seulement LGBTQI+ c’est aussi quelqu’un qui est issu de cette communauté, qui n’est certainement pas aussi monolithique qu’on le pense et surtout encore une fois on voit qu’une facette de l’expérience: on voit la difficulté d’être queer quand on est issu d’un contexte culturel minoritaire, mais on ne mentionne jamais l’autre facette de l’expérience qui est que quand on est LGBTQI+ et qu’on est issu de communautés culturelles minoritaires, on doit négocier à la fois son identité queer dans sa communauté d’origine, ce qui peut être plus ou moins facile, mais on doit aussi négocier le racisme qu’on vit dans le milieu queer. Parce que les personnes racisées dans le milieu queer vont être exoticisées, fétichisées, on va leur assigner des stéréotypes raciaux qui n’ont absolument pas lieu d’être et donc encore une fois il y a une facette extrêmement diverse de l’expérience d’être queer et issu des communautés culturelles minoritaires mais en tant que pédagogue souvent issu de la majorité blanche, on pense à juste un aspect, on ne pense pas à l’autre alors que pour ce jeune ces deux réalités sont absolument indissociables et l’une ne va pas sans l’autre.
Donc encore une fois on se rappelle qui on est, on se rappelle d’où on vient, on se rappelle de c’est quoi notre expérience et on essaie de se projeter dans les expériences des autres. Il n’y avait pas de mauvaises intentions mais ça peut être dommageable pour les autres
Une autre catégorie d’exclusion: l’invisibilisation.
Là on va prendre l’exemple d’une jeune lesbienne et un jeune gars trans donc c’est des citations:
« Je me souviens de ma première fois: deux vulves. Je ne savais pas quoi faire, en éduc sex on parle toujours de pénis plus vagin j’ai dû googler: « comment avoir du sexe lesbien. »
« C’est pas normal que ce soit internet qui m’ait appris les mots nécessaires pour parler de moi, j’aurais dû apprendre ça à l’école. »
On a deux personnes en fait qui ont eu de l’éducation à la sexualité, mais de toute évidence l’éducation à la sexualité qu’il et elle ont reçu ne leur ont pas du tout donné les informations dont il et elle avaient besoin au moment où iels en avaient besoin et donc iels ont dû aller sur internet donc iels ont probablement trébuché sur tout un tas de bêtises et de faussetés et probablement de la pornographie qui n’était pas ce qu’iels cherchaient à ce moment-là parce qu’iels voulaient juste des réponses à leurs questions. et donc dans le cadre pédagogique on a vraiment failli à notre tâche. Et c’est quoi les impacts? Ça peut être très très grave, au-delà de l’anecdote. On a un jeune trans qui nous dit:
« Si j’avais eu accès à une éducation à la sexualité inclusive j’aurais compris plus tôt pourquoi j’étais si mal dans ma peau. J’aurais pu entamer des procédures médicales plus tôt et faire mon coming out 4 ans avant. »
On a une personne qui parce qu’on ne lui a pas mentionné son identité et qui probablement n’avait pas accès à mettre un mot sur son mal-être et sur les possibles qui pouvaient exister, a retardé son coming out de quatre ans. On sait que les jeunes trans sont particulièrement à risque de suicide, de troubles mentaux. Quatre ans ça peut être long quand tu sais pas où tu t’en vas, avant de faire ton coming out. Alors que ça aurait pu être si simple que dans le contexte d’éducation à la sexualité on mentionne les transidentités, on mentionne que ça existe, que ça peut être là, que ça peut être formidable et qu’il y a des ressources qui existent pour les jeunes qui se questionnent.
Autre invisibilisation: la sexualité des femmes cisgenres.
« Ils te disent toutes les choses négatives: ça fait mal, tu devrais attendre, tu peux attraper quelque chose, tu sais tout ce qui peut aller mal, mais ils ne parlent jamais des bonnes choses. »
« Je suis pas mal certaine que le clitoris n’a jamais été mentionné. Comment peux-tu enseigner l’éducation à la sexualité sans jamais parler du clitoris? »
et ensuite il y a une citation en anglais que j’ai pas eu le temps de traduire mais en gros c’est plusieurs filles qui discutent dans un focus group et qui disent:
« J’avais entendu jamais entendu parler du mot orgasme jusqu’à ce que j’aie 14 ans c’est comme on en parle jamais on parle les garçons les garçons leur orgasme et tout je savais même pas que les filles pouvaient avoir un orgasme jusqu’à ce que j’aie 14 ans. »
Effectivement ce qui se passe en éducation à la sexualité c’est qu’on invisibilise le plaisir des femmes et ça ça a des conséquences sur l’empowerment, sur le fait que les personnes assignées femmes à la naissance puissent savoir à quoi aspirer quand elles s’engagent dans une relation sexuelle que le consentement c’est pas juste dire non, que le consentement c’est aussi dire: Oui! puis savoir à quoi dire oui que t’es en droit de t’attendre: d’avoir du plaisir, d’avoir des orgasmes, d’être respectée, mais finalement on tait toute cette expérience autour de la sexualité et du plaisir et ça c’est dommageable. C’est finalement comme si les filles étaient un petit peu passives et que toute la sexualité reposait sur les hommes et leur sexualité. C’est des stéréotypes qui sont très dommageables: la sexualité irrépressible des jeunes garçons et les jeunes filles qui doivent finalement être un petit peu les gardiennes du temple et de leur virginité. Ça a des impacts sur comment tu te construis en tant qu’agent.e sexuel.le et voici une citation de jeune filles qui dit que comme on parlait jamais du plaisir puis de la sexualité en termes positif pour les filles:
« Ça m’a fait sentir que le sexe c’est mal et qu »y succomber est un signe de faiblesse. Je pense que si j’en avais appris un petit peu plus sur le fait que la sexualité est une activité saine, normale, et qui peut nous faire sentir bien ça aurait changé pas mal de choses. »
On voit que l’impact est quand même vraiment, vraiment lourd pour cette personne. Penser que le sexe c’est mal puis que tu es coupable…
Et on sait que souvent quand on est en contexte pédagogique que c’est le malaise qui est en arrière on sait pas comment parler de ces choses là, on sait pas comment parler de plaisir dans la sexualité, on se dit: ça va rire, ça va ricaner, ça va faire du brouhaha, etc. Mais c’est hyper important parce que sinon on parle de la sexualité des hommes hétéros et pas de la sexualité des autres. En invisibilisant, ça laisse des conséquences je vais passer sur la prochaine slide parce que c’est un petit peu ce que je viens de dire donc je vais juste vous lire l’extrait c’est un exemple, une jeune fille qui dit:
« Les professeurs ils parlent toujours des garçons ils expliquent tout ce qu’il y a à savoir sur eux, ce qu’ils doivent faire, pas faire,
mais à propos de nous il nous disent juste de ne pas perdre notre virginité. »
On va pas loin avec ça. Donc on rate l’opportunité de donner des outils pour naviguer sa sexualité.
Généralisation d’un modèle normatif unique.
En fait c’est, pareil en termes de représentations sociales en fait c’est de c’est encore une fois on pense que tout le monde arrive avec les mêmes expériences. Je vais vous donner deux exemples et c’est un peu difficile quand même quand on y pense. Quelque chose qui ont est souvent dit dans un contexte d’éducation à sexualité c’est :
« La première fois c’est important. Lorsque toutes les conditions sont réunies pour que ça se passe bien avec le ou la partenaire avec qui on est amoureux, en confiance, ça ouvre la porte à une belle sexualité. «
Et effectivement, une première fois réussie c’est formidable et ça ouvre la porte à une belle sexualité. Sauf que on est absolument certain que quel que soit le contexte dans lequel on enseigne il va y avoir une ou des personnes pour qui l’entrée en sexualité ça va pas avoir été une belle expérience en confiance et amoureux. Quand on sait les taux d’inceste, quand on sait les taux de violence sexuelle sur les enfants, quand on sait les taux d’agressions sexuelles, il y a beaucoup de personnes pour qui la première fois c’était pas le fun voire même les fois d’après et en fait quand on dit ça on n’est pas « trauma-informed » on fait pas attention à comment vont se sentir les personnes pour qui l’entrée en sexualité s’est fait dans la violence, dans la honte, dans la douleur. Et finalement c’est comme on leur laisse pas miroiter la possibilité que eux et elles aussi peuvent avoir accès à une belle sexualité, même si leur première fois a pas été formidable.
Un autre exemple qu’on dit souvent encore dans la conférence que j’organisais il y a deux-trois jours il y a quelqu’un qui a donné l’exemple. Tu vas … dans n’importe quel contexte ça peut se passer au médecin ou au planning… Au médecin souvent et tu dis :
« Si vous envisagez de devenir actif ou active sexuellement c’est important de planifier votre méthode de contraception. »
Oui, effectivement. Mais aussi il y a des personnes pour qui il n’y aura pas besoin de méthode de contraception, il va falloir parler de plus de protection ITSS mais il faut les mentionner ces personnes là parce que si on les mentionne pas on les marginalise on parle d’un modèle unique que toutes les personnes vont entrer en sexualité hétéro que toutes les personnes vont entrer en sexualité sans contrainte sans coercition, sans violence, c’est pas la réalité donc il faut toujours avoir une approche qui tient compte de cette diversité sinon on repousse les gens dans les marges. Si on résume en fait si on met la parole des jeunes au centre (on va prendre la on va prendre cet exemple là parce que souvent l’éducation à la sexualité c’est avec les jeunes mais sachant que ça peut prendre tout un tas de formes)
C’est quoi qu’ils veulent les jeunes?
- Des modèles positifs et diversifiés de la sexualité. Iels veulent se voir, voir leurs expériences représentées dans leur diversité
- Iels ne veulent pas se faire assigner à des catégories prédéterminées selon leur genre assigné à la naissance, leur ethnicité, leur situation de handicap etc.
- Iels veulent se faire reconnaître comme des individus à part entières
- iels veulent qu’on aborde les aspects relationnels de la sexualité pas juste la reproduction, les ITSS, puis tout ça. Iels rentrent en sexualité, iels ont des questions iels ont besoin d’être outillé.e.s, iels veulent savoir et c’est notre rôle de leur donner les outils pour qu’iels puissent naviguer ça. J
Je vous mets une autre citation d’un jeune qui dit: » on n’avait pas le droit de poser des questions, ils n’ont même pas mentionné les différentes orientations sexuelles ou de genre. C’était pas mal réduit à: « voici votre anatomie, bonne chance! »
Donc ça c’est vraiment ce à quoi on veut pas que ça ressemble l’éducation à la sexualité.
Pourquoi en fait l’inclusion c’est important? Parce qu’on veut que jamais un jeune ne nous dise cette phrase là:
« C’est comme, merde! Si tu es pas représenté, si tu ne te vois pas quand on parle de sexualité humaine, ben t’es juste pas humain. T’es juste pas humain parce que t’es pas inclus et ça c’est vraiment fucké. »
On veut jamais qu’un jeune se sente comme ça. On veut jamais qu’un adulte se sente comme ça. Sente qu’il est pas humain parce qu’on a pas inclut sa réalité dans la sexualité. On est tous et toutes humains dans notre diversité. C’est vraiment important finalement l’éducation à la sexualité. Ça touche à beaucoup plus de sujets que le sexe: ça touche à notre rapport au corps, aux changements qui ont lieu dans les moments de la vie, au consentement, aux relations familiales, etc. Ça touche à une multiplicité de trucs et en tant que pédagogue en fait on a la possibilité de jouer un rôle dans la vie des jeunes, on a la capacité de les outiller, de les accompagner mais vraiment la façon dont on va jouer ce rôle là en fait, ce dont on se rend compte avec les exemples précédemment donnés, c’est que malheureusement, des fois, on peut nuire, des fois on peut juste contribuer au statu quo, mais ce qui est formidable c’est qu’on peut aussi avoir un impact absolument formidable pour les outiller et puis pour les émanciper.
Donc, concrètement, on fait quoi?
C’est la grande question parce qu’au-delà des grandes déclarations c’est on fait quoi au jour le jour, concrètement, dans notre pratique? Il y a une chose qu’on fait pas en tout cas c’est la stratégie des « modules supplémentaires » Je vous explique ce que c’est et pourquoi on fait pas ça.
La stratégie des modules supplémentaires en fait c’est on garde notre cursus d’éducation à la sexualité exactement comme il est et on rajoute une ou deux séances sur par exemple la lutte à l’homophobie et la transphobie et je sais pas l’inclusion l’inclusion de la sexualité des personnes handicapées. Donc on fait ça en fait, aussi bien intentionné que ce soit, on contribue à remarginaliser ces choses-là, ces identités-là, ces expériences-là parce qu’on continue à avoir un cursus qui est centré sur l’expérience majoritaire blanche, hétéro, basée sur la pénétration, personne qui a toutes ses capacités physiques, etc. et on rajoute quelque chose comme quoi il ne faut pas discriminer et ça aussi c’est important.
Mais en fait en rajoutant ça comme un module supplémentaire à la fin, ça contribue à renforcer la marginalisation, le fait que tu ne fais pas partie de la norme. Donc ce qu’on fait au contraire c’est on prend ce qui n’était pas dans notre cursus et on l’intègre de façon transversale et à travers nos exemples et à travers nos outils et à travers tout ce qu’on fait on est sûr et certain d’avoir inclus des exemples de personnes qui sont de la diversité capacitaire, qui sont de la diversité ethnique, qui sont de la diversité queer et en fait on donne autant de place à toutes les expériences pour les normaliser parce que toutes ces expériences sont humaines et toutes ces expériences ont le droit d’être considérées, toutes ces personnes ont le droit de recevoir de l’information sur leur réalité
Ce qu’on fait: on panique pas tout simplement
Ça peut paraître tout d’un coup énorme on se dit ohlala! Mais là faut que je me forme sur toutes les réalités: des personnes trans, des personnes intersexes, la racisation, le racisme je sais pas etc. On panique pas et on respire. Ces gens-là ils ont toujours été dans nos classes c’est juste en ce moment on entend leurs voix alors que pendant longtemps on n’a pas entendu leurs voix. Donc c’est juste un rattrapage à faire on a tout le temps du rattrapage à faire de toute façon comme vous le savez ça fait longtemps que vous pratiquez, on ne pratique pas la même façon qu’il y a 10 ans qu »il y a 20 ans, que maintenant, que dans 5 ans. Donc finalement ça fait partie d’une formation continue.
Qu’est-ce qu’on fait? On continue à s’informer
sur les meilleures connaissances et pratiques en matière d’éducation à la sexualité. C’est à dire dans des colloques, on lit des blogues, on lit Sexoblogue peu importe mais on se garde à jour de c’est quoi qui se passe dans le milieu. On développe nos savoirs-êtres aussi donc c’est pas juste nos connaissances sur l’éducation à la sexualité c’est le comment on les transmet donc on déconstruit nos représentations sociales qui sont ancrées dans qui on est, d’où on vient et on se décentre et on est capable d’accueillir la diversité de notre public.
Aussi super important pour moi c’est on développe les connaissances sur le public à qui on parle
et ça on est vraiment très très chanceux parce que comment mieux savoir c’est quoi que pensent des jeunes de 15 ans? On a les réseaux sociaux et ça c’est absolument formidable. Suivez des jeunes qui sont des influenceurs/euses qui parlent de leur réalité queer, qui parlent de leur réalité trans, qui parlent de leur réalité de dating en situation de handicap. On a un accès absolument phénoménal à une parole directe, aux gens, à ce qu’ils vivent et à comment ils se perçoivent. Et donc en suivant tout simplement des personnes sur les réseaux sociaux on est capable de suivre plein de discussions, plein de réalités, et on s’entend qu’on n’a pas 15 ans la plupart du temps quand on fait d’éducation à la sexualité mais c’est super important de savoir c’est où qu’ils en sont, c’est quoi qu’ils pensent, c’est quoi qui se passe dans cette catégorie d’âge à ce moment là et de le savoir de leur propre point de vue.
Et dernier point: on développe une compréhension des contextes sociaux et de leurs impacts sur les corps et les relations.
Ça je vais y revenir parce que c’est la partie sur la sexualité et la politique. Dans le rapport de recherche qu’on a fait avec les collègues de l’UQAM dont je vous ai parlé au début dans les recommandations qu’on sortait on parlait de comment concevoir le rôle du ou de la pédagogue. je vais vous lire cette recommandation: Les pédagogues doivent agir de façon proactive et égalitaire. Cet impératif nécessite entre autre une capacité à identifier et à déconstruire ses propres méconnaissances et préjugés afin de ne pas les diffuser dans la classe, de ne pas renforcer et reproduire des relations de pouvoir inégalitaires et d’éviter d’appliquer un double standard car toutes ces conduites ont un impact négatif
1) sur les jeunes dont les identités et les pratiques et expériences sont divergentes de la norme et
2) sur ceux et celles qui sont dans la majorité et qui ne peuvent pas décentrer leur regard
Donc il faut qu’on travaille sur comment on approche notre pratique pédagogique pour les jeunes qui sont minorisés mais aussi pour tous les autres parce que ces autres-là vont être en contact dans leur vie avec des personnes minorisées et il faut développer la connaissance, l’acceptation et la solidarité entre entre les personnes tout simplement.
Donc là quand je vous disais qu’il faut être ouvert sur ce qui se passe dans le monde j’en reviens à l’idée du début c’est que la sexualité ça ne se vit pas en vase clos c’est pas quelque chose qui se vit uniquement entre des personnes oui c’est quelque chose de relationnel mais ça se vit aussi dans un contexte politique qui est traversé par une diversité d’axes d’oppressions et de privilèges que ce soit la race, la classe, le contexte migratoire, le genre, etc. donc on a tout un tas de choses qui impactent en fait la façon dont sont vécues nos sexualités, dont sont vécues nos familles, dont sont vécues nos vies finalement. Et si on ne tient pas compte de ça on rate beaucoup nos interventions en éducation à la sexualité.
Je vais vous donner un exemple qui comme je vis en Amérique du Nord pour moi c’est plus proche pour vous ça sera peut-être plus loin mais vous allez comprendre l’idée Aux États-Unis on a un stéréotype très pregnant qui est la famille Noire monoparentale avec le père absent. C’est statistiquement d’ailleurs démontré que c’est une réalité. Si on s’arrête à cette statistique puis à cette réalité qu’est-ce qu’on peut en conclure finalement c’est que les pères d’origine Africaine-Américaine sont absents et les mères élèvent leur famille toute seule On est vraiment très très loin d’avoir une compréhension globale de cette réalité-là. La réalité c’est qu’aux États-Unis il y a un système qui est extrêmement discriminant envers les personnes racisées, spécifiquement les hommes Noirs. Qu’il y en a 1/3 qui va connaître l’incarcération dans sa vie, qu’il y a énormément de harcèlement policier, de violences policières, qu’il y a beaucoup d’incarcérations injustifiées ou pour des broutilles qui ciblent les hommes Noirs qui sont perçus comme des corps dangereux et délinquants. Il y a aussi tout un système capitaliste de prisons privées qu’il faut remplir parce que ça rapporte beaucoup d’argent aux États. Donc là on a une réalité d’avoir un tiers des hommes Noirs qui vont passer par la case prison à un moment de leur vie pour des raisons variées et diverses, qui pendant qu’ils vont être en prison ne vont pas gagner d’argent donc ne vont pas pouvoir payer leur pension alimentaires et donc ils vont sortir de prison ils
vont avoir de la difficulté à trouver un emploi parce que ils sont passé par la case prison et qui vont avoir un mandat d’arrêt sur eux parce que ils sont en retard de paiement de pension alimentaire. Donc on a quelque chose qui fait comme absolument système sur le pourquoi finalement les familles Africaines-Américaines pour une partie le père est absent et ce n’est pas lié comme à la seulement où à la moralité et aux conditions personnelles des personnes qui étaient dans la relation. Il y a comme toute une relation systémique à comment on peut vivre sa famille dans un contexte où le racisme et l’incarcération sont omniprésents. Et la discrimination.
Si on intervient avec des jeunes filles des communautés Africaines-Américaines aux États-Unis et qu’on parle de projet familial sans inclure toutes ces considérations on passe complètement à côté d’une intervention réussie parce qu’on n’est pas capable de mettre en contexte l’expérience vécue de ces personnes là et de leur donner les outils pour faire sens d’une réalité qui va les affliger qui va potentiellement les concerner et qui teinte leur vie de façon de façon absolue. C’est un exemple ça peut paraître loin mais je suis sûr qu’en France il y a une multiplicité de contextes ou comme certaines réalités, certaines statistiques, doivent être prises dans un cadre d’analyse beaucoup plus large pour pouvoir remettre la réalité des personnes au centre
et donc je vais finir sur les trois dernières slides je suis presque totalement dans mon temps donc j’en suis assez contente. Ce que j’aimerais que vous repartiez avec …mon Dieu cette syntaxe était terrible …c’est que l’éducation à la sexualité ça a vraiment un impact et qu’il y a des principes qui nous permettent de vraiment nous mettre à jour dans nos pratiques et de faire un petit peu des checkpoint de « Est-ce que j’ai fait ça? Est-ce que j’ai fait ça ? Est-ce que dans mon cursus il y a ça?
Pour moi c’est vraiment de promouvoir une éducation à la sexualité qui soit positive, inclusive et émancipative.
Ça veut dire quoi positive?
- On reconnaît le droit des personnes avoir une sexualité ou pas (toutes les personnes)
- On promeut l’idée que la sexualité est une source de plaisir et de bien-être On reconnaît que le désir joue un rôle dans les décisions que prennent les gens
- On encourage chacun et chacune à réaliser son plein potentiel sexuel quelle que soit la forme de celui-ci, sans jugement, tant que les parties impliquées sont consentantes et
- On reconnaît la capacité de chacun et chacune de faire les meilleurs choix par rapport à sa vie sexuelle et reproductive, dans le contexte qui est le sien parce que nos choix sont souvent limités par nos contextes et nos possibilités
Une éducation à la sexualité inclusive
- Tient compte de la diversité des corps des expériences, des vécus, et des identités en matière de sexualité
- Reflète cette diversité dans les contenus qu’on propose et dans le matériel pédagogique qu’on utilise.
- Adapte ses contenus et ses approches pédagogiques aux différentes capacités du public visé.
- Tient compte des besoins et de l’expertise du public visé et intègre toutes les réalités dans son cursus parce que les élèves ont le droit de recevoir l’information qui leur est nécessaire pour faire des choix éclairés dans leur vie intime quelles que soient leurs identités, leurs capacités ou leurs expériences. ça n’a aucun sens que certain.e.s élèves ne reçoivent pas l ‘information dont ils est elles ont besoin
Et le dernier point: une éducation à la sexualité émancipatrice.
- Ça souligne les liens entre les différents systèmes d’oppressions/privilèges et la sexualité. Par exemple quels corps sont considérés comme désirables ou indésirables, qui a accès à l’intimité, qui a la capacité de faire des choix?
- Ça aide à faire sens des dynamiques sociales politiques et économiques et de leurs impacts sur les sexualités et à politiser les vécus. C’est passer du « je » au « nous », c’est « le privé est politique » des années 70 c’est vraiment comme faire un sens plus global de ce qu’on vit au niveau intime
- Ça contribue à montrer du doigt les systèmes qui impactent nos vies affectives et sexuelles par exemple racisme, le capacitisme, la grossophobie, la culture du viol, le cishétérosexisme, le classisme etc. et ce faisant c’est pas juste montrer du doigt c’est donner des pistes pour les démanteler et pour nous émanciper individuellement et collectivement. C’est un processus d’empowerment.
- Ça s’inscrit dans un processus actif de réalisation de la justice sociale
Finalement tout ceci ça ne peut qu’avoir un impact positif pour les personnes qui sont directement concernées, pour les personnes qui ne sont pas directement concernées mais qui vont interagir avec des personnes directement concernées à un moment où l’autre de leur vie. Ça a aussi un impact positif pour nous dans notre pratique parce qu’en fait en se décentrant, en allant voir ce qui se passe dans ce qui pour nous est notre marge en sortant de notre zone identitaire expérientielle on développe de nouvelles compréhensions et ça fait de nous des meilleurs pédagogues et praticien.ne.s.
Moi par exemple dans mon parcours ce qui a vraiment vraiment révolutionné ma façon de penser la sexualité c’est d’aller lire et partager des textes et des récits sur le sexe lesbien, sur le kink, sur la sexualité en situation de handicap. Ça m’a permis de complètement repenser mes notions de consentement, mes notions de sexualité sans génitalité, des questions aussi comme la simultanéité du plaisir. En tout cas ça m’a vraiment aidée à ouvrir comment je pensais la sexualité et les possibles sexuels parce que j’ai été chercher quelque chose qui n’était pas
dans ma pratique et dans ma connaissance. Et je pense qu’on a tous à gagner à vraiment aller chercher les paroles et les expertises « pour et par ».
Et on s’entend que tout ce dont je vous ai parlé c’est pas évident, c’est sûr qu’on manque de temps, on manque de ressources et il y a des obstacles sur le terrain, on a peur de l’institution, du directeur d’école, de la réaction des parents, de tout un tas d’obstacles, dans nos pratiques. Il y a aussi des contre mouvements qui commencent à se faire entendre très fort.
Mais après il faut choisir ses stratégies puis moi à travers le projet SEX-ED + je me suis rendu compte que la stratégie des pieds sur la table était étonnamment efficace. En fait j’ai décidé quand j’ai parti le projet il y a 5 ans il y avait tout un tas de professionnel.le.s qui me disaient « moi je suis pas à l’aise de parler de transidentité, je suis pas formé.e » un exemple parmi d’autres et donc qui en fait n’en parlaient pas.
Quand j’ai créé les outils en fait je les ai créés pour que toutes les identités soient visibles c’est à dire même si vous achetez un outil d’une personne qui est cisgenre, ça va être mentionné qu’elle est cisgenre et donc ça va de facto visibiliser le fait qu’il y a une réalité trans
et en fait en prenant cette position politique-là et en rendant ces outils disponibles, que les gens ont achetés et qui sont rendus comme dans une multitude de classes, de contextes d’éducation à la sexualité ben en fait cette stratégie des pieds sur la table ça fait qu’on ne peut plus éviter la question. Ça ne repose plus sur les jeunes ou les personnes qui sont dans la classe de dire « eh! mon identité est pas représentée, pourquoi on parle pas de moi? »
J’ai adopté la stratégie de visibiliser la diversité et de littéralement la poser sur la table et en fait tous les gens qui me disaient qu’ils n’étaient pas à l’aise et qu’ils ne savaient pas comment en parler, ils se sont formés, puis ils se sont outillés, puis je suis sûre que leur pratique a été enrichie du fait d’inclure plus de diversité dans leur parcours et qui se sentent comme beaucoup mieux dans leur pratique.
Et en fait c’est ça que je nous souhaite qu’on soit tous et toutes absolument enchanté.e.s du travail qu’on fait. C’est un privilège d’accompagner les gens dans leur développement, dans leur connaissance d’eux-mêmes puis d’elles-mêmes et ça vient avec tout un tas de défis mais finalement c’est vraiment vraiment un grand privilège et je nous remercie toutes et tous du travail qu’on fait parce que c’est important puis on se le dit pas assez souvent et si on souligne nos manquements puis nos angles morts, il faut aussi comme souligner nos forces et le travail formidable qu’on fait donc il faut toujours être dans cette espèce de de mélange de gratitude et de questionnements.
Voilà sur ce je vous laisse j’espère ne pas vous avoir trop assommés de paroles, vous pouvez me contacter à travers Arnaud, à travers le site positivesexed.org et ça me fera plaisir de répondre à vos questions, de donner des compléments d’information ou quoi que ce soit sur ce je vous souhaite une excellente soirée merci
Merci beaucoup Magaly pour cette intervention qui était extrêmement éclairante et enrichissante, avec des aspects presque philosophiques mais tout en restant pragmatique et donc vraiment c’était super j’espère qu’on aura l’occasion de continuer nos partenariats et à travailler ensemble parce que effectivement on a des pratiques très complémentaires et je trouve que ton approche elle est vraiment super moi je suis un soignant de base alors donc du coup tout ce qui est les sciences politiques et tout je connais pas trop mais du coup tu m’ouvres à plein de choses et donc du coup ben merci également à tous les participants qui étaient très nombreux et avant de sauter dans votre char et d’aller manger une bonne poutine n’oubliez pas qu’il y a encore une dernière intervention en attendant cette intervention si vous voulez on peut essayer de jaser encore une petite minute dans la fenêtre de clavardage à tout de suite
[Musique]
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